jeudi 21 avril 2016

TRANSHUMANISME ET ETHIQUE CHRETIENNE par Noel Imbert-Bouchard. Avril 2016.






Introduction

C’est le frère du romancier Aldous Huxley, le biologiste et eugéniste, Julian Huxley  qui a crée le terme transhumanisme (« transitory human ») dans les années 50. Il sera ici abrégé en H+ (sigle adopté par ce mouvement)  pour éviter les trop nombreuses répétitions.
Le H+ sous sa forme actuelle naquit véritablement en Californie dans les années 80 sous l’impulsion des philosophes Nick Boostrom et David Pearce. Il s’agissait non plus seulement d’exploiter un potentiel génétique sélectionné mais de piloter le devenir de l’humanité en changeant la nature humaine elle même. L’objectif des H+  est d’entamer une transition radicale vers une post-humanité[1]grâce au développement exponentiel de la recherche et de ses applications dans le domaine des nanotechnologies, de la biologie ( génétique) de l’informatique(intelligence artificielle) et des neurosciences(cognition) rassemblées sous l’acronyme NBIC. Le progrès scientifique permettrait de vaincre les  maladies, d’accroître la longévité humaine de manière infinie et de vaincre la mort elle-même. Pour la première fois dans l’histoire, c’est la nature même de l’homme qui serait transmutée, celui-ci devenant un nouveau créateur de lui-même, son propre demiurge. Cet homme « augmented » serait un hybride mi-organique, mi- informatique: un « cyborg »  semblable à celui qu’ont popularisé les mythes antiques,[2] la littérature  ou les films de science fiction. Au terme de cette symbiose l’humain virtualisé deviendrait programme lui-même.
Joël Molinario note[3]« Le TH+ remet en cause tous les présupposés anthropologiques portés par le judéo christianisme et relayés par la pensée moderne. La différence homme-femme, la frontière animal-homme et homme-nature, le lien homme- machine et les limites du corps humain d’avec le corps prophétique et finalement la limite mortelle» qui ne serait plus qu’une erreur.

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1-La pensée Transhumanisme

Il n’y a pas un, mais des H +. Beaucoup sont redevables  à  Raymond Kurzweil[4]. Ce très brillant scientifique américain pionnier de l’Intelligence Artificielle (I.A) est à l’origine du concept de « singularité » technologique. Selon cette théorie, les développements technologiques devraient être si rapides que la courbe du progrès deviendrait non plus linéaire mais exponentielle. L’I.A dépasserait ainsi de manière irréversible à un moment « singulier » vers 2030 les capacités du cerveau de l’homme. Dans le journal La Croix consacré au H+, une phrase de R. Kurzweil extraite de son ouvrage « The singularity is near » l’illustre « la Singularité nous permettra de dépasser les limitations de notre corps et de nos cerveaux, nous serons en mesure de vivre aussi longtemps que nous le voudrons ». [5]





Le  H+  postule que la convergence des NBIC (nanotechnologies, biotechnologies, informatique, neurosciences) va faire reculer la mort de façon spectaculaire, voire la  supprimer. De plus  les H+ prévoyant que l’I.A ayant la capacité de s’autoprogrammer, de se  reproduire, et d’évoluer, le cerveau humain se trouvera rapidement dépassé et obsolète sauf à s’allier de manière fusionnelle avec l’I.A pour créer une entité hybride mariant un organisme biologique à des prothèses électroniques et des circuits informatiques connectés: un « cyborg ». Dans vingt ou trente ans des nano-robots cérébraux pourraient assurer la connexion des cerveaux à internet, et ces neuroprothèses se relieront entre elles dans des réseaux intelligents dans lesquels réel et virtuel seront en osmose. Les T+  s’appuient sur les laboratoires de pointe de la Silicon Valley dans la génétique, les nanotechnologies ou l’ I.A ; Ces développements inquiètent  des experts aussi avertis que le physicien Stephan Hawking ou le fondateur de Microsoft Bill Gates qui, avec mille scientifiques de renom, ont attiré l’attention du gouvernement américain sur les dangers  de l’I.A. En France, cette orientation stratégique des sociétés californiennes fait l’objet de mise en garde de nombreux « lanceurs  d’alerte » comme le chirurgien Laurent Alexandre[6], les philosophes  Jean Michel Besnier[7], Bertrand Vergely[8], le mouvement technophobe grenoblois « Pièces et Main d’Oeuvre» (MPO)[9]. Certains courants H+ sont extrêmes comme celui des sextropiens [10] fondé par Max More et Tom Morrow (la sextropie étant la non-entropie). Ils visent à conquérir l’immortalité par la cryogénie, les manipulations génétiques, la transmutation du corps en cyborg, et« l’uploading ». Les cerveaux humains téléchargés pourront se déployer dans  un univers virtuel enfin s’affranchir de la tyrannie de la matière. Les sextropiens considèrent que les humains sous leur forme actuelle constituent une phase transitoire de l’histoire de la matière, positionnée entre le règne animal et un futur post -humain.
Mais par ailleurs R. Kurzweil a mis au point de nombreux programmes d’aide aux handicapés qui sont des succès et  a créé une fondation pour aider les handicapés moteurs. Ses réussites médicales qui permettent de« réparer »l’homme sont révélatrices de la difficulté à saisir les différentes facettes du H+ et de fixer la frontière entre l’homme« réparé »et l’homme « modifié ». D’autres courants H+, non sans ambiguïté parfois, s’inscrivent dans une perspective plus conforme à l’éthique traditionnelle. Ils visent à utiliser les technologies nouvelles pour  allonger la vie humaine en bonne santé. C’est le cas de la World Transhumanist Association (WTA) dénommée également« Humanity + »[11]qui valorise un recours éthique aux NBIC et milite pour une utilisation démocratique de celles-ci. C’est le cas aussi de l’Association Française  de Transhumanisme (AFT -Technoprog) qui indique dans sa raison sociale[12]«Technoprog, se réclame  d’un « transhumanisme démocratique» ou techno-progressisme. Elle donne au H+ le but  de vivre beaucoup plus longtemps en bonne santé, d’augmenter les capacités sensorimotrices et cognitives, d’être plus heureux et plus empathiques, de vivre dans une société démocratique et durable, de diminuer les risques qui menacent l’humanité». Le mérite  de l’AFT est de rester globalement modérée et de stimuler le débat notamment avec les Entrepreneurs et Dirigeants Chrétiens (EDC) qui se préoccupent de ces questions. Mais les différents courants H+ en revanche, ont en commun  de refuser de se référer à des religions ou d’envisager  une «vie après la vie» puisque la mort sera vaincue. Max More a déclaré dans une interview : «la religion chrétienne a constitué un frein au progrès social et technologique. Elle tend à séparer le monde sacré et spirituel du monde réel, considéré comme «déchu », «  corrompu » et « avili », en dénigrant le progrès matériel, antithétique au salut spirituel »[1


La pensée H+ ne forme donc pas un bloc homogène mais une nébuleuse dans laquelle peuvent êtreidentifiés des neuroscientifiques comme Jean Pierre Changeux ou Henri Markram (qui pilote le Humain Brain Simulation Project)[14], des roboticiens comme le japonais Hiroshi Ishiguro ou l’autrichien Hans Moravec, des cogniticiens comme Marvin Minsky (du MIT) ou R. Kurzweil,  des généticiens, des biologistes.
                                         



2- Science, Technologie  et Transhumanisme

La science moderne semble d’abord se caractériser par la diffusion  inexorable de ses applications technologiques. Dans l’espace mondial libéralisé les frontières légales ou éthiques résistent mal et finissent  souvent par être abolies sous les pressions conjuguées des intérêts économiques, médiatiques et sociétaux. Deux exemples illustrent cette poussée internationale: celui de la GPA et celui des cellules embryonnaires.
La Gestation Pour Autrui ( GPA) est interdite en France mais autorisée, et même organisée, dans certains pays (Belgique, Pays Bas, Pologne) et les citoyens  français qui y recourent  voient leurs enfants reconnus légalement en France ce qui est contradictoire avec la loi qu’il sera nécessaire sans doute de modifier. Ce n’est d’ailleurs qu’à une très courte majorité que la commission des questions sociales du Conseil de l’Europe vient de rejeter en mars 2016 un rapport en faveur de la GPA « éthique ». Mais cette possibilité est réclamée  par les couples de femmes qui veulent bénéficier d’une légalisation de la  PMA et de la GPA au regard de ce qui est autorisé à l’étranger. Le 16 mars 2016, 130 médecins français réunis autour des professeurs René Frydman et Michaël Grynberg ont publié un manifeste[15]dans lequel ils reconnaissent avoir aidé des couples homosexuels à avoir des enfants malgré l’interdiction légale. Ils  interpellent les pouvoirs publics pour ouvrir la PMA à toutes les femmes et par ailleurs lever totalement les restrictions sur le diagnostic préimplantatoire, ce qui fait réagir le biologiste Jacques Testard[16] qui pointe une dérive potentiellement eugéniste dans cette course au chromosome parfait  et un risque de fabriquer un monde ou tout individu diffèrent sera suspect et potentiellement éliminable des droits humains et sociaux : un monde de libéralisme génétique.
Autre sujet en débat : en France la loi bioéthique de 2013 encadre de manière restrictive le droit de recherche sur les embryons surnuméraires et sur les thérapies géniques. Mais les mêmes recherches sont conduites en Chine depuis 2015 dans des conditions qui semblent moins transparentes.[17] Depuis février  2016 au Royaume Uni ont été autorisées des recherches sur les embryons surnuméraires (dans but de recherche et non de reproduction)[18]. Désormais certains scientifiques français réclament une libéralisation des contraintes dans ce secteur. L’UNESCO en décembre 2015 a souhaité un moratoire sur la manipulation de l’ADN des cellules reproductrices humaines et appelle au débat. Mais à l’opposé  les associations de malades atteints de maladies héréditaires  aux USA demandent avec insistance une libéralisation  totale au nom de l’urgence médicale.
Ces deux exemples, dans lesquels le droit à l’enfant est toujours exigé, mais rarement celui du droit des enfants font réagir Jean François Mattei : « le manifeste laisse à penser que ses signataires reconnaissent un droit à l’enfant qui ferait entrer ce dernier dans la catégorie des objets. Il ignore l’intérêt supérieur de l’enfant garanti par des conventions internationales » souligne-t-il  dans le journal La Croix[19] et il ajoute « Si on ouvre la PMA à des couples de femmes, on ne peut éviter d’aller vers la GPA, au motif de l’égalité des droits entre couples ».

Mais indépendamment de leur mode de diffusion souvent irrépressible, c’est bien plus encore la nature même des progrès biologiques  qui est  préoccupante. La mise au point récente d’un nouvelle technique de transformation du génome (ciseau génétique Crispr/cas 9) [20]peu coûteuse permet de « couper -coller » des gènes dans l’ADN au sein de n’importe quelle cellule à un endroit précis. Cette technique va  permettre d’intervenir sur les génomes d’espèces nuisibles comme les moustiques porteurs de la dengue, du chikunguya ou du virus zika. Cela pourrait permettre aussi de corriger les maladies génétiques humaines comme la mucoviscidose avec plus d’efficacité que les thérapies géniques classiques[21]. Mais rien n’empêcherait  avec facilité cette fois-ci de transmettre de nouveaux caractères génétiques aux nouveaux nés pour « produire » des humains « augmentés » de caractéristiques particulières physiques ou intellectuelles. Une des deux chercheuses découvreuses de cette technique Emmanuelle Charpentier en convient et n’exclue pas les dérives: «Dès qu’on manipule le vivant il y a un risque de dérive (il est important que tous les acteurs de la société - les scientifiques, les cliniciens, les experts en éthique, le public- puissent comprendre les possibilités qu'offre cette technologie et les dérives possibles. Je serais très touchée si cette technologie était utilisée dans des dérives que j'estime inacceptables. ».[22]Ces modifications génétiques, qu’elles soient  humaine, végétale[23]ou animale, se transmettraient ensuite aux générations suivantes de manière pérenne et impliqueraient des modifications de la biodiversité non évaluables à ce stade. Car la science se heurte parfois à une « barrière de complexité » qui provoque des effets non désirés et incitent à l’extrême précaution. Pierre Jouanet, chercheur français, déclarait récemment à propos de l’utilisation génétique et du Crispr/Cas 9 : « Il faudra notamment remédier aux rares mais réels effets hors cible, imprévisibles, qui parfois modifie l’ADN à d’autres endroits qu’au lieu souhaité »[24]. Le prédictif scientifique dans ce domaine reste lourd d’aléatoire et d’incertitudes.
 Les interventions de plus en plus intrusives sur les embryons ou sur les gamètes  sont un sujet de préoccupation des différents comités d’éthique. Jean Marie Le Mene, président de la fondation Jérôme-Lejeune, propose de conférer aux cellules sexuelles un statut ontologique protecteur et d’établir un moratoire permanent sur ces interventions[25]. Mais pour d’autres, comme le biologiste Hervé Chnelweiss[26]cette idée semble illusoire car il estime que  ce n’est  pas l’instrument qui pose question mais l’usage qu’on en fait.
Dans le domaine des neurosciences et des prothèses, les limites entre homme  « réparé ou /et augmenté » trouve des illustrations spectaculaires. Les  exemples les plus médiatisés sont ceux d’handicapés bénéficiaires de prothèses bioniques ou d’amputés qui peuvent mouvoir des bras robotisés par la seule force de leur pensée avec des capteurs neuronaux. Ces adjonctions artificielles permettent d’envisager des performances que le corps humain naturel rendait impossible. Mais si le coureur olympique Oscar Pisterius grâce à ses prothèses artificielles peut courir plus vite qu’un autre homme serait-ce une raison pour inciter d’autres sportifs à se faire amputer pour accroître leurs performances ?[27]Cette difficulté a donné lieu à un vif débat au sein de la Fédération Internationale d’Athlétisme ; certains voulaient homologuer les performances de cet homme considéré comme « réparé», d’autres les refusant estimant qu’il avait été « augmenté » par rapport aux coureurs valides: les différents comités médicaux n’ont pu trancher la question de manière décisive ce qui illustre la difficulté d’établir une frontière claire. Paradoxalement comme l’indique Joël Molinario citant Peter Sloderjik[28] « les invalides deviendraient les précurseurs de l’homme de demain.».

De même dans le domaine de l’intelligence artificielle nombre de transactions boursières (encours des assurances, fonds de placements) sont opérées par des algorithmes automatisés sophistiqués « trading algorithmique » ainsi que les prévisions météo, les régulations des transports, le pilotage des drones militaires etc.… Des pans entiers de l’économie peuvent se trouver déséquilibrés dans les vingt ans à venir par la suppression après les « cols bleus » dans l’industrie de postes de « cols blancs » dans les services  (comptables, infirmiers, aides soignantes, instituteurs etc...). Face à ces bouleversements gigantesques à venir la prospective politique et économique reste embryonne.



 Jean Michel Besnier note qu’avec les NBIC c’est l’identité humaine qui est mise en cause car « il achève de rendre précaire le frontières entre le vivant et la machine »[29]. Pour autant ces développements spectaculaires ne laissent pas présager l’avènement rapide du « cyborg » prédit par R. Kurzwzeil. Car les véritables progrès pour l’instant de l’I.A et des différents systèmes experts est de pouvoir traiter en quelques secondes des millions de solutions alternatives que l’esprit humain est incapable d’effectuer (à la puissance phénoménale   pour l’ordinateur Deep Mind mis au point par Google qui vient  de battre le champion du monde de jeu de GO)[30].  Même si les techniques permettent à un ordinateur de créer des modèles à partir d'une grande quantité d'exemples, puis de s'auto-entraîner, l’état présent de l’I.A ne permet pas à des logiciels d’apprécier un environnement, d’avoir des intuitions, d’inventer  des procès de reproduction, de faire preuve d’empathie, d’éprouver des sentiments. De plus le cerveau n’est pas un mécanisme mais un organe adaptatif. Bruno Poncet neuroscientifique chercheur au CNRS estime que "le cerveau humain dispose de flexibilité, il peut catégoriser des informations très rapidement pour évacuer les éléments non essentiels. Surtout, le cerveau apprend très rapidement, se développe et "s'auto-façonne" physiquement, c'est la plasticité que la machine n'a pas. La capacité d'abstraction du cerveau est énorme, il manipule des symboles, pas des données. »[31].




Une autre donnée de l’histoire des technologies est sous estimée par les H+. Le progrès technique n’est ni linéaire ni exponentiel. Dans leur évolution les technologies se complètent  plus qu’elles ne se substituent. L’histoire des techniques témoigne que des formes et des fonctions perdurent, se complètent, que de lents glissements s‘opèrent avant que la valeur d’usage d’une innovation s’impose. A chaque stade d’évolution du système technique correspond une conception du temps, une utilisation de l’énergie, des modes de production des matériaux et une organisation spécifique comme le montre Thierry Gaudin[32]. Le temps des clepsydres n’est pas celui de la nanoseconde. Dans la mécanique complexe qu’est le progrès, « le just in time » est décisif : il est hasardeux de prévoir avec certitude comme les H+ le font qu’un cerveau informatique va remplacer un cerveau humain ou qu’une transformation génétique va radicalement modifier l’espèce. De nouvelles technologies  suppléent d’autres jamais exploitées (ainsi en Afrique le téléphone portable a fait économiser le passage par le filaire).
L’évolution  H+ n’est envisagée que sur le plan individuel et jamais collectif vers d’autres possibles comme celui que le scientifique Joël de Rosnay nomme « l’hyper humanisme »[33]. Il imagine que l’humanité pourrait évoluer en complémentarité avec l’I.A  vers un univers symbiotique qui intégrerait collectivement et solidairement les possibilités nouvelles qu’offre la numérisation aux besoins de la collectivité pour créer plus d‘humanisation.
Une  prévention justifiée que l’on peut nourrir à l’encontre des H+   tient justement au fait que ceux-ci visent  à convaincre les esprits du caractère inéluctable de leurs prévisions, alors qu’elles ne sont que des projections hypothétiques, que leur caractère opératoire est aléatoire et que le champ des possibles est beaucoup plus ouvert qu’ils ne le prétendent.
Mais la pensée H+ ne s’appuie pas que sur la technique, elle bénéficie  également d’un ethos : celui de la post modernité qui en facilite l’émergence et la diffusion.


3- Post modernité et Transhumanisme

La modernité  résulte d’un long processus entamé à la Renaissance que marquèrent ensuite de penseurs comme Descartes ou Spinoza, qui ont posé le sujet comme maître et possesseur d’une nature assujettie et d’une raison autonome. Mais l’autoproduction du sujet, la  maîtrise supposée de la raison, l’accaparement de la nature par la technique ont conduit ni à la liberté espérée du sujet, ni à la régulation raisonnée du monde. Au XX° siècle, les génocides, les conflits idéologiques mondiaux, la crise spirituelle, sont symptomatiques de cet échec. Philosophes, romanciers, plasticiens témoignent chacun à leur façon du doute qui assaille l’homme contemporain. La raison se révèle impuissante à organiser un monde désenchanté que les valeurs du christianisme ont abandonné au profit d’un humanisme coupé de toute transcendance. Pour Marcel Gauchet[34] la raison doute désormais profondément d’elle -même et elle  ne permet pas de sortir de cette crise identitaire puisque c’est son exaltation qui en est la  cause. Comme l’écrit Henri Georges Gagey « la post modernité c’est toujours  la modernité mais la modernité désenchantée, problématisée, autorelativisée, désamarrée. ».[35]
Dans ce  contexte poursuit Henri Georges Gagey « les seules normes qui parviennent à s’imposer indiscutablement, mais par défaut, sont celles des technosciences et des marchés »[36].  La technique se trouve créditée de la mission subreptice de répondre à  des questions que la raison a échoué à résoudre. Dans un entretien au journal La Croix[37]le philosophe Jean Marie Besnier déclare: «Une raison du succès des H+ est d’ordre spirituel. Après les barbaries du XX° siècle l’homme ne s’aime plus. L’humanité semble traverser une profonde dépression marquée par cette mésestime de soi (…). Puisque la volonté de l’homme conduit au pire pourquoi ne pas s’en remettre aux machines et travailler à l’émergence d’une nouvelle humanité. A travers ces courants, l’homme paraît jouer son va tout ». Cet auto assujettissement va de pair avec la financiarisation de l’économie, le développement  de marchés mondialisés, une exacerbation des désirs de consommation, une unidimensionnalisation de l’homme moderne. Les valeurs  deviennent peu à peu des produits. La morale peine à conserver une place  puisque la technique est censée être neutre, objective, sans idéologie; c’est elle, désormais  qui codifie les rapports de l’homme au monde. Aussi  les lois se donnent souvent plus pour objet de faire correspondre le droit aux changements  technologiques que de contraindre ceux-ci à se plier à une utilité collective. Peut-être que demain la GPA, l’euthanasie, le suicide assisté ou les manipulations génétiques deviendront des actes considérés comme purement techniques, que la normalisation juridique les transformera en actes moralement acceptables par la collectivité. Ce qui fait dire à un généticien comme Arnold Munnich-Olivier Rey : « la question n’est pas d’opposer les droits de la société à ceux des individus mais de faire prendre conscience aux individus que seule une société dont les équilibres sont respectés est à même de leur garantir durablement des droits (…). Or le législateur semble courir derrière les changements sociétaux. ».[38]
 La production culturelle récente témoigne de cette lassitude morale. La déprise de soi,  le renoncement désenchanté de l’homme post-moderne est décrit avec talent par  Michel Houellebecq. Ce romancier, produit des biopsies littéraires désabusées et nihilistes de la société occidentale. Ses héros, semblables  à Meursault dans « L’Étranger » d’Albert Camus, vivent le réel comme une étrangeté distanciée à laquelle ils n’adhèrent pas et pour laquelle il n’ont pas d’empathie. Ils sont littéralement « zombifiés » comme les personnages du film « Bienvenue à Gattaca ». Dans ce dernier, le futur  est  lisse et glacé,  génétiquement modelé, séparant la société entre nantis et affamés; univers qui exsude une tristesse désenchantée d’hommes qui ont accepté avec lassitude de se laisser glisser dans ce déni d’humanité qui déjà résonne comme une métaphore sinistre des temps à venir.







                                              
4- Trois fondamentaux de la pensée H+ : la technophilie, l’illimité, le relativisme

Un des mérites du H+ est de nous conduire à repenser l’humain et à revisiter les concepts d’humanisme et de nature.[39]Même si celui de nature est polysémique, il désigne philosophiquement la totalité de ce qui a en soi son principe de développement et ce qui fait qu’une chose est ce qu’elle est. Sylvia Agacinsky souligne que c’est avec Pic de la Mirandole, que l’homme créateur de lui-même se dote d’une nature sans essence. Luc Ferry  écrit : « C’est Pic de la Mirandole qui va formuler l’idée moderne de liberté (…) ; idée qui parcourra toute la philosophie moderne chez Rousseau, Kant, Sartre et même Husserl, Heidegger. Il va inventer l’humanisme moderne »[40]. Sylvia Agacinski voit dans le H+ une évolution de l’idée humaniste plus qu’une opposition radicale à celle-ci  dont elle constitue un aboutissement.
La philosophie contemporaine, fidèle en cela aux Lumières,  a rejeté  la préexistence d’une quelconque essence: comme le rappelle Sartre[41] l’homme n’est que ce qu’il fait, que le produit de ses actes. Admettre une essence c’est ouvrir  à une éthique transcendantale puisque « quelque chose » préexiste à l’homme. A l’inverse sa négation n’exclue pas une véritable éthique humaine de la fraternité chez Camus, Malraux ou Sartre, car une plate-forme commune d’humanisme rassemble «celui qui croyait au ciel et celui qui n’y croyait pas »[42]: c’est au regard de ce  référentiel humain commun  que le H+ peut être évalué. La loi morale naturelle peut être commune à tous. Comme l’écrit Joseph Fuchs cité par Henri-Georges Gagey : «la morale chrétienne est fondamentalement et essentiellement humaine dans sa détermination catégoriale et sa matérialité. C’est donc une morale d’authentique humanité »[43]. Il suffit que la morale commune soit humanisante pour que l’éthique chrétienne l’agrée et s’en saisisse avec l’aide de la foi. Geneviève Médevielle souligne « la foi réinscrit les motivations éthiques dans sa propre logique. »[44]

Bien que multiple, ambivalente, mouvante  la pensée h+ peut être synthétisée autour de quelques invariants, plus ou moins accentués suivant les sensibilités des  courants H+


La technophilie.
 Les H+ pensent  que la synergie des différentes NBIC  et leur caractère exponentiel constituent un nouveau paradigme scientifique qui modifiera profondément la nature humaine. Cet avenir  les conduit à faire de la technique la saisine privilégiée  du réel.
Ce «paradigme technocratique dominant » est dénoncé  dans la lettre encyclique papale Laudato si: «nous ne pouvons ignorer  que la biotechnologie, la connaissance de notre ADN nous donne un terrible pouvoir (…) surtout le pouvoir économique d’avoir une emprise impressionnante sur l’ensemble de l’humanité (…) comme si le bien  et la vérité surgissaient spontanément du pouvoir technologique et économique lui-même ». Il est écrit un peu  plus loin : « la technologie a crée un paradigme homogène et unidimensionnel (… ) qui loin d’être neutre dans ses effets oriente les possibilités sociales dans la ligne des intérêts de groupes de pouvoirs déterminés »[45]. Ces lignes font un écho direct à l’encyclique papale Fides et Ratio du 14 septembre 1998: « Dans le cadre de la recherche scientifique, on en est venu à imposer une mentalité positiviste qui s'est non seulement éloignée de toute référence à la vision chrétienne du monde, mais qui a aussi et surtout laissé de côté toute référence à une conception métaphysique et morale ».


L’illimité.
 L’innovation technologique se diffuse  par capillarité : les frontières éthiques ou juridiques s’effaçant progressivement. La technologie se fond dans un libéralisme économique, social et moral libéré de toutes contraintes, sans  références au passé, sans attaches au présent. Elise Marrou cite le sociologue polonais Zygmunt Bauman qui qualifie cette économie de « modernité liquide » c’est-à-dire «une modernité sans structure, sans modèle, sans solidité institutionnelle».[46] Ce réseautage des fluidités s’impose comme une façon d’organiser et d’être au monde. Mais  note Régis Debray : « Qu’il soit utile de mettre le monde en réseau ne signifie pas que l’on puisse habiter ce  réseau comme un monde. ».[47] Car l’établissement de frontières est constitutif de la psyché humaine comme de l’organisation des sociétés. Son rôle est de réguler, comme celui de la peau, un échange entre un dehors et un dedans. « Ce qu’il y a de plus profond dans l’homme c’est la peau » écrit Paul Valery. [48] Toute mise en ordre symbolique d’un indifférencié, est crée par une limite. Le polémologue Gaston Bouthoul soutenait que ce n’était pas les frontières qui créaient les guerres mais leur absence. L’illimité crée le risque du chaos, comme l’absence  de limite fait apparaître celui de ne pouvoir la transgresser. Le H+ espérant libérer  l’homme de  sa limite  principale qui est la mort, l’humanité ayant abattue par la technique cette ultime frontière, vivra  une eschatologie terrestre. Pourtant Régis Debray écrit justement: « s’il n’y a pas de frontière pour toujours, il y a toujours une ultime frontière. ».[49]


                                               

Le relativisme.
 Le relativisme domine la pensée H+: le seul repère est celui de l’évolution. Depuis la paramécie l’homme est en perpétuelle transformation comme les autres espèces animales dont il n’est pas diffèrent (99% du génome humain est commun à celui des grands singes). Pour les H+  la matière, le hasard et la nécessité seuls guident l’évolution des 1% différents comme le soutenait Jacques Monod[50]. Comme le note Paul Ricoeur cité par Geneviève Médevielle : « le scientifique suit l’ordre descendant  des espèces et fait apparaître l’aspect contingent, aléatoire, improbable de ce résultat que nous sommes de l’évolution (…) l’herméneute partira de l’auto-interprétation de sa situation intellectuelle, morale et spirituelle et  remontera le cours de l’évolution à la rencontre des  sources de la vie (...) son point de départ avoué  étant  la question morale elle même, donnée déjà là, surgissant dans une sorte d’auto-referentialité de Principe ».[51]Le technologue H+ accompagne cette évolution biologique « descendante » de l’espèce en espérant en prendre le contrôle. L’herméneute s’autosaisit de l’humaine condition  pour « remonter » vers la source qui lui a donné naissance afin d’en comprendre le projet. C’est à la rencontre de ces deux versants que se situe l’humain qui est à la fois l’observateur de son « donné là » et l’acteur de son «vouloir  être» éthique. En n’empruntant que la pente descendante le H+ prive l’humain de sa capacité de sens qui est pour Xavier Thevenot, [52]à la fois signification et direction. Ce réductionnisme constitue  un angle mort  de la pensée H+: l’illimité devenant l’ultime limite, l’absence de sens  deviendra le sens ultime.


5- Trois marqueurs de l’anthropologie chrétienne : la corporéité, la relation, la finitude.

Si la technophilie, l’illimité et le relativisme marquent le H+ ils viennent percuter le corps, la relation et la finitude qui sont des marqueurs profondément humains parce que profondément chrétiens et profondément chrétiens parce que profondément humains. « Tout ce qui se commande au nom de Dieu  doit pouvoir se commander  du point de vue de la vérité de l’homme; tout ce qui se commande au nom de l’homme doit pouvoir se commander au nom de la vérité de la foi chrétienne» Xavier Thevenot.[53]

La corporéité
L’homme est chair. Il y a de la chair animale sans humain mais il n’est pas d’humain, c’est-à-dire de la conscience sans chair « Il ne suffit pas d’être biologiquement homme pour être humain. Il y a un devenir humain qui s’inscrit dans une finalité qui n‘est pas biologique mais éthique »  note Geneviève Medevielle[54].
Tout humain dispose d’une  série de fonctions organisées en système kinesthésique global (odorat, goût, digestion, motricité, sensation, etc...) dont la pensée elle-même dépend. L’humain n’est pas la juxtaposition de fonctions réflexives  et de fonctions organiques  mais il est constitué par l’intégration de celles-ci dans une boucle  systémique  dans laquelle chaque partie s’articule au tout de manière rétroactive. Les neuroscientifiques insistent sur les rôles respectifs des rétro-informations entre la pensée et les sensations. Michel Onfray a montré dans « le ventre de philosophes »[55]à quel point la pensée est dépendante des fonctions organiques. De récentes études sur le microbiote (flore intestinale) montrent que celui-ci comprend des milliers de bactéries différentes et des centaines de milliers de gènes qui gouvernent le système nerveux, sanguin, immunitaire et qui influent  sur l’esprit, l’hérédité ou le  vieillissement.[56] Ce qui fait écrire  au professeur Stephen Collins, gastro-entérologue de l'université McMaster d'Hamilton (Canada) « que la flore intestinale puisse avoir un impact sur les fonctions cérébrales et le comportement »[57].
Un chercheur en psychopathologie Erwin Straus a montré, en opposition à Descartes, que ce n’est pas d’abord la conscience qui définit l’homme, mais la relation empathique (pathos) qu’il entretient avec l’environnement (unwelt). Les différentes multidirectionnalités (organiques, émotionnelles, environnementales, psychologiques, sociétales) qui caractérisent la corporéité de l’humain interrogent les H+. Ils constatent cette complexité  et estiment qu’il sera nécessaire de simuler l’ensemble de ces tissus relationnels avant d’envisager un « uploading » cervical réussi[58]. Ils regrettent en conséquence que  les projets européen Human Brain Project (HBP) ou américain BRAIN n’envisagent qu’une modélisation des neurones du cerveau. Un article de Marc Roux (AFT -Technoprog)  se conclue ainsi : « Il faudra donc que les progrès de la puissance de calcul et de simulation de nos machines tiennent toutes leurs promesses mais que nos scientifiques améliorent aussi considérablement leur travail de modélisation avant de voir émerger quoi que ce soit. ».
Mais la corporéité  envisagée  comme homéostasie introduit une donnée utile dans la distinction entre « homme réparé » et « homme augmenté ». L’homme réparé est celui à qui l’on tente de restituer l’intégralité des fonctionnalités évoquées ci-dessus au moyen de prothèses physiques, électroniques ou chimiques. En revanche la même  technique qui aurait pour but non pas de « restaurer » mais « d’augmenter » de manière artificielle une  fonction physique ou mentale d’un individu, porterait atteinte à l’équilibre d’ensemble de ses différentes fonctions kinesthésiques et créerait des déséquilibres en chaîne imprévisibles pour lui (et éventuellement pour sa descendance). Lorsqu’un homme est « augmenté »  d’une fonction il devient simultanément « diminué » d’une autre. L’homme réparé est celui chez qui l’on restaure un équilibre, l’homme augmenté est celui chez qui on en détruit un. Arnold Munich-Olivier Rey, chef du département génétique de l’hôpital Necker déclarait en janvier 2016 :[59]« l’homme augmenté n’est pas une apothéose de l’humain mais l’humain réduit à la seule pulsion d’emprise, et qui pour l’assouvir, est prêt à devenir esclave des machines qui étaient censées l’émanciper, qui n’a plus d’autre rêve que la perspective nihiliste d’un branchement toujours plus parfait sur la machine technico-économique globale et une résorption dans ses flux. Nous cherchons à créer le golem, on connaît la suite. ».
Dans le christianisme l’incarnation c’est-à-dire étymologiquement l’action de prendre corps est centrale. « Le Verbe s’est fait chair ». Jésus a vécu dans sa chair tout ce qu’un corps humain peut ressentir,  jusqu’à la douleur de la passion. Né d’une femme dans le sang, ayant grandi dans un corps d’adolescent, étant mort dans un corps d’homme, sa corporéité n’est pas symbolique. Son corps n’est pas un vêtement de chair jeté sur ses épaules spirituelles comme Marcion le soutenait au II° siècle. « Mais assez souvent le théologien oublie de montrer que l’homme dont le Christ est la pleine révélation est justement l’homme qui vit dans un contexte historique, social et culturel précis, et il n’est pas simplement l’homme en général, déconnecté de toute référence d’espace et de temps » écrit Féderico Badiali.[60]Les évangiles accordent une place importante à la corporéité et au manger du Christ (les noces, les pains, les poissons, la cène, Emmaüs etc..) ce qui lui a même valu des critiques acerbes : “il boit, et vous dites: “Voilà un glouton et un ivrogne..”» (Luc 7, 33-34). Jésus ressuscité, dîne avec les apôtres fréquemment (Act. 1,3; Luc 24,30) « les disciples restaient encore incrédules et comme ils s’étonnaient, il leur dit. “Avez-vous ici de quoi manger?” Ils lui offrirent un morceau de poisson grillé. Il le prit et mangea sous leurs yeux.» (Luc 24, 42-43). C’est vérifiant la corporéité du ressuscité, qui pourtant n’appartient déjà plus à l’histoire ni au temps, que Thomas croit.
Claude Hadjaj traduit cette proximité humaine de Jésus ressuscité par ces mots : « Et puis il mange avec eux (…). Son apparence est parfois même celle du premier venu (…) les pèlerins d'Emmaüs le prennent pour un promeneur (…). Pourquoi cela? Parce que Dieu vient vraiment sauver sa créature dans ce qu'elle a de plus humain »[61].
Souchée sur la référence biblique, la position catholique est claire : « le corps participe à la dignité de « l’image de Dieu »: il est corps humain précisément parce  qu’il est animé par l’âme spirituelle (…) l’unité de l’âme et du corps est si profonde que l’on doit considérer l’âme comme la forme du corps (…) l’esprit  et la matière dans l’homme ne sont pas deux natures unies, mais leur union forme une seule nature »[62]. Karl Rahner ajoute « l’âme ne peut pas se réaliser sans la médiation de la matière et plus elle se réalise, plus donc l’homme devient esprit, plus l’homme lui même devient corps ».

La  relation
L’humain est un être relationnel. Cette relation s’exprime d’abord sous forme sexuée. Cette qualité l’apparente au règne animal tout en l’en différenciant. Xavier Thevenot remarque que « toute relation humaine aux choses, aux autres  et à Dieu est sexuée, même si elle n’est pas génitale »[63]. Cette sexualisation est depuis l’enfance ouverture aux autres. L’individu baigne dans un complexe relationnel (relation à la mère, aux autres, au cosmos). Pour devenir pleinement adulte l’enfant devra apprendre à se séparer du monde fusionnel qu’il forme avec sa mère. L’inceste, symboliquement, c’est chercher à retrouver  l’indifférenciation originelle. La relation avec l’autre passe par le refus de la « mêmeté ». C’est dans  la séparation conscientisée, le renoncement au monde fusionnel de l’œuf maternel, par la castration symbolique et le manque qui en résulte que l’homme subit l’épreuve initiatique qui fait de lui un humain. Les interdits qui pèsent sur l’inceste, l’homosexualité, la masturbation – interdits communs à la plupart des grands textes et traditions spirituelles – reposent sur le refus de la mêmeté. Ce qui fait inscrire à Xavier Thevenot en tête d’un chapitre sur la castration symbolique cette citation de Lacan proprement « fracassante »: «  A casser l’œuf se fait l’homme mais aussi l’Hommelette »[64] car le prix de cette brisure est celui d’un manque. Le H+ en revanche exprime l’espoir d’une fusion virtuelle moniste absolue dans laquelle rien ne sera différencié. Mais en supprimant la relation réelle à l’autre c’est soi-même que l’on supprime. Merleau Ponty  écrivait « Notre rapport au vrai passe par les autres. Ou bien nous allons au vrai avec eux, ou ce n’est pas au vrai que nous allons »[65]. Cette indifférenciation pour quelques uns créera une ségrégation sociale et  économique pour les autres. Henri Georges Gagey cite un transhumaniste Bruce Benderson qui écrit: «les gens avec l’intelligence, l’éducation et /ou les richesses deviendront une espèce qui aura des pouvoirs très supérieurs à ceux de l’espèce humaine (…) les autres deviendront l’espèce inferieure, incapables de survivre ou ne pourront survivre que pour servir d’esclaves ou de viande pour les autres (comme une vache aujourd’hui). [66]  (On pense au clonage)
Bertrand Jordan biologiste moléculaire décrit ainsi cette aliénation relationnelle : «on peut facilement entrevoir un monde dans lequel le libre jeu du marché permettrait aux super riches d’améliorer le patrimoine génétique de leur descendance d’ajouter ainsi aux considérables inégalités économiques actuelles un privilège génétique transmissible aux générations suivantes. Est-ce bien là l’avenir que nous souhaitons pour l’avenir de l’humanité »?[67]Le H+ porte en lui de nouvelles formes d’eugénisme (car si la vie est infiniment prolongée, il ne serait plus possible d’y laisser accéder de nouveaux venus, ni d’y laisser survivre ceux qui ne répondraient plus aux critères de vie « transformée »).
Dans les récits de la genèse biblique, que ce soit en Gn1.1-23 dans laquelle le couple humain est crée simultanément, ou en Gn 2. 4-3. 24, dans laquelle Ève n’est formée qu’après Adam, c’est la différenciation qui fait l’humain. On n’est pas humain seul. La problématique d’origine psychanalytique repose sur cette nécessité de l’interdit - symbolisé par le Père-  qui permet à l’homme de trouver son identité à travers le renoncement. C’est une symbolique du renoncement chrétien en œuvre dans la dramaturgie pascale qui  paraît à Xavier Thevenot  intrinsèquement anthropologique. « Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il se renie lui-même et prenne sa croix et me suive »  (Marc  8,34). Car relation et lâcher prise sont les deux faces d’une même réalité. Le lâcher prise nous rend disponible à la relation à l’autre et permet au chrétien de nouer la relation avec Dieu.
            Dans l’univers H+, comme à Babel les hommes  ne parleront plus que  d’une « seule lèvre » et adhéreront à un programme « matriciel » unique dont ils n’auront ni la volonté ni l’opportunité de se séparer, rassemblés sous la conduite d’une seule « tête ». Dans le processus d’arraisonnement de la nature par la technologie, l’homme est requis dans sa corporéité pour devenir un matériau au même titre que les autres. Dans ce processus « technophagique », devenu lui-même produit il s’auto-dévore. A Babel, Dieu « descend » pour disperser cette édification totalitaire de l’homme contre l’homme  qui se déconstruit lui même.







La finitude
« Dans tous les aspects de l’évolution on constate que la vie et la mort sont indissociables et indispensables l’une à l’autre» écrit Joël de Rosnay.[68]Il voit même dans le refus de la finitude l’expression d’un égoïsme pur, opposé à l’évolution elle-même.
L’inéluctabilité de sa finitude est la principale prise de conscience de l’homme sommé  de trouver un sens  à son bref passage sur terre. Le poète Rainer Maria Rilke dans le « Livre de la Pauvreté et la mort » l’a exprimé ainsi : « Car nous ne sommes que l’écorce et que la feuille, la grande mort que tout homme en soi porte, tel est le fruit autour duquel gravite tout. Ô seigneur donne à chacun sa propre mort, la mort issue de cette vie où il trouva l’amour, un sens et la détresse.[69]Ce poème fait écho à un écrit du psychologue  D.W  Winicott à la fin de sa vie : « Ô mon Dieu ! Fais que je sois vivant au moment de ma mort !». Comme indiqué ci-dessus, abolir cet horizon indépassable de la condition humaine en « tuant la mort» est l’ambition suprême du H+. L’Association Mondiale H+ citée par Anne-Marie Pelletier déclare : «Nous souhaitons nous épanouir en transcendant nos limites biologiques actuelles visant un monde où nous aurons aboli les êtres humains en tant que tel»[70].
L’avènement d’un monde sans fin tel que le souhaite les H+ équivaut à  la fin de tout avènement. Il illustre l’aphorisme de Nietzche dans «Ainsi parlait Zarathoustra» : on peut mourir d’être immortel». Ne serions-nous pas condamnés dans ce cas à l’éternelle répétition et à la fin de tout projet puisque l’ambition H+ soutient  le projet ultime d’une fin? Dans une société du «toujours-là» ne serions-nous pas privés de toute innovation, de tout progrès  puisque rien de nouveau ne pourrait se manifester? Comment vivre un pur et éternel présent? Bertrand Vergely écrit : «la mort met fin au cauchemar de ce qui est sans fin».[71] Et il poursuit : «Quand la mort existe, le risque existe sous la forme du risque de mourir et comme le risque existe, la valeur existe. Quand la mort n’existe plus, le risque n‘existant plus, la valeur disparaît. Si tel est le cas à quoi bon  naître?».
Xavier Thevenot écrit qu’il faut «en passer par la mort pour connaître la résurrection».[72]Pour un chrétien la finitude terrestre est la condition de sa résurrection éternelle.
Aussi la volonté de séparation corps-esprit  pour supprimer la mort  est un «contre-sens» chrétien. Parce que c’est avec ce corps et ce sang que nous partageons ecclésialement une commune humanité avec Dieu. C’est avec ce corps glorieux à l’exemple du Christ que nous ressusciterons, semblables et différents. Ce corps « pathique » ressuscité  étant celui de tous nos ressentis et éprouvés. Face à un corps, fut-il défiguré, abîmé, supplicié, nous reconnaissons en lui l’humain que Dieu a fait à son image et à sa ressemblance. Le corps n’est pas le «tombeau de l’âme» de Platon, ni la matière qui entrave le développement numérisé et virtualisé de l’esprit ; il est un pont, le point de jonction entre le «déjà là»  et le «pas encore».

6- Le déploiement d’un  agir chrétien opérationnel
Le H+ dans sa forme la plus extrême, est anthropologiquement régressive, scientifiquement incertaine et heurte l’éthique chrétienne.



 Une pensée  anthropologiquement régressive.
La pensée H+ correspond aux caractéristiques d’un monde fusionnel régressif tel que  Xavier  Thevenot le définit :
-«  un monde sans faille donc sans échec et sans mort».
- « un monde indifférencié, sans espace ni temps».
-« un monde de la toute puissance ou tout semble possible».
-« un monde de coïncidence avec son origine». 

 Une pensée  scientifique incertaine
Beaucoup d’annonces H+ restent incertaines quand à leur prédictibilité scientifique des données importantes sur le plan scientifique comme l’homéostasie corporelle ou les modes d’évolution des technologies sont passées sous silence.
Par ailleurs, la pensée H+ est lacunaire voire inexistante concernant les modes de dévolution des décisions collectives. Ceux-ci sont attribués par défaut à l’action conjuguée de la technique, qui s’impose comme norme sociétale et morale et au marché, qui régule les besoins économiques individuels. La technologie est toujours pensée comme un moyen au service de l’individu, jamais comme un outil d’optimisation du bien être collectif. Dans les plus extrêmes scénarios présentés l’organisation collective est imaginée comme la domination de classes privilégiées sur d’autres exploitées de manière totalitaire.





Une pensée anti-chrétienne
Le théologien protestant Denis Müller écrit : «les théories transhumanistes peuvent remettre en cause l’anthropologie chrétienne sur deux points : elles nient la finitude de la  création humaine et ignorent totalement la notion de péché. Pour ces théoriciens, le salut n’est donc en rien relié au péché. Il dépend au contraire de l’homme seul».[73] Jean Guillerm Xerri chargé d’une réflexion par l’épiscopat sur le sujet ajoute : « le Th+ percute à la fois l’incarnation, la grâce et la résurrection. ».[74]
La technophilie, le relativisme, la volonté d’illimité du H+ viennent buter sur l’incarnation, la relation à l’autre, la finitude de l’anthropologie chrétienne et posent de nouvelles questions à l’éthique. «Anticiper de nouvelles questions sans repères antérieurs est le rôle de la théologie morale» dit Marie Dominique Trebuchet[75]

Principes chrétiens
C’est à partir des principes qui guident une éthique chrétienne que nous pouvons tenter d’apporter une pierre utile à la construction d’un agir collectif.
- Faire vivre l’action chrétienne à travers la logique de l’évangile qui n’est pas une morale de l’interdit et de l’obligation mais une dynamique de l’amour et du don,
- aller vers toujours plus d’humanisation (en développant la relation avec l’autre et le plus fragile : l’embryon, l’handicapé, le malade, le souffrant, le mourant, le pauvre),
- savoir renoncer, savoir partager «il n’est de vérité que partagée et là où la vérité n’est pas partagée, il n’y a pas de vérité» dit Joseph Moingt. [76] «Considérez-vous comme dépendants les uns des autres» (Epître aux Ephésiens 5 ,21), c’est-à-dire favoriser les solidarités économiques nouvelles, l’innovation sociale, les actions  solidaires, l’émergence de  pensées désaliénées.

Actions guidées par ces principes
«  La morale en situation nécessite de se «salir les mains» pour faire droit à la complexité du réel»[77]note encore Xavier Thevenot. En les innervant par ces principes chrétiens,  il est imaginable de développer des actions qui répondent aux défis du temps présent posés par le H+ à savoir :

·      Comprendre les mécanismes par lesquels la pensée H+ se conforte : Il y a urgence à mettre en place une réflexion  éthique globale. C’est ce que souligne Jean Michel Besnier : «plutôt que de nous crisper sur des positions morales qui garantirent la sécurité du monde d’hier, nous devons faire face et mobiliser les ressources de l’imaginaire. Il s’y exprime déjà le scénario d’une vie éthique régénérée, libérée du carcan des représentations la source de nos actuelles vulnérabilités »[78].
·      Se mettre à l’écoute des penseurs de la modernité. Le H+  ne s’alimente pas des seules avancées scientifiques mais aussi de la crise morale et spirituelle de la post modernité, ce qui fait écrire à Henri Georges Gagey : il s‘agit de se mettre à l’écoute des penseurs qui trouvent, précisément dans leur traversée de la déconstruction contemporaine du phénomène humain, les ressources pour envisager la reconstruction ou la refondation théorique et pratique d’un nouvel humanisme ».
·      Étudier la pensée  T+ elle-même pour la soumettre dans ses présupposés les plus extrêmes à ses propres insuffisances et contradictions mais aussi à ce qu’elle peut apporter de neuf et positif sur le plan médical et humain en favorisant le dialogue avec ses promoteurs les plus conscients de leur responsabilités éthiques.
·       Combattre la mentalité scientiste qui réussit à faire agréer l'idée que ce qui est techniquement réalisable devient par là-même moralement acceptable en réintroduisant le singulier dans le particulier  et l’universel. Il convient  comme l’écrit Geneviève Médevielle  «de formuler des propositions morales qui soient en accord avec cette  essence technique  de l’homme (…)  car l’éthique ne relève pas d’un donné – ici celui de la technique aveugle – mais d’un « à vouloir ». [79]
·      Globaliser la problématique H+. Comme l’encyclique papale sur l’écologie Laudato Si le souligne, les phénomènes humains ne sont plus pensables isolement les uns des autres. Le rapport que les hommes entretiennent avec leur devenir comme espèce ne sont plus séparables des rapports économiques , des emprises communicationnels, des liens de subordination, des inégalités sociales qui facilitent l’idolâtrie de la technologie et du marché.
Accompagner les scientifiques concernés. En suivant les travaux qui permettent de tracer  les frontières  entre l’homme « réparé » et l’homme « augmenté » dans les deux domaines les plus critiques que sont la génétique et les neuro sciences. Les NBIC ouvrent  des perspectives de progrès médicaux et humains fascinantes et inédites et ces  avancées  sont interconnectées : chaque progrès dans l’une engendre des progrès dans les autres de manière incrémentale ou par innovation de rupture ce qui en accroît l’imprévisibilité globale. Les T+ utilisent cette imprévisibilité en prédisant un caractère inéluctable à un futur qu’ils souhaitent, et qui n’est pas celui que les chrétiens peuvent espérer construire.

 CONCLUSION.
Il n’y pas de « pensée H+ » au sens ou l’on entend généralement par école de pensée  un déploiement philosophique et épistémologique. Le H+ dans ses courants extrêmes  procède d’un désir  plus que d’une pensée; désir infantile de perpétuation, d’immortalité, de « surhumanité »  qui appartient depuis toujours à la mythologie humaine.
In fine chaque chrétien et chaque humain peut se fier à l’extrême pointe de sa conscience morale par rapport au H+. Il lui apparaîtra sans doute dans une syndérèse  intuitive qu’il y a dans la pensée H+  une volonté profanatoire de l’humain.
Rien n’est joué et rien n’est perdu en faveur d’une humanisation comme l’indique Laudato Si : «L’authentique humanité qui invite à une nouvelle synthèse, semble habiter au milieu de la civilisation technologique presque de manière imperceptible, comme le brouillard qui filtre sous une porte close. Serait-ce une promesse permanente, malgré tout jaillissant comme une résistance obstinée de ce qui est authentique. ».


                       


[1] Le terme « Transhumanisme » désigne ici le processus d ‘auto-transformation dans lequel les sciences engagent la nature humaine et celui de « post-humanisme » l’état final que cette évolution permettra d’atteindre
[2] Notamment dans des sources aussi diverses  que le nectar grec, boisson conférant l’immortalité, le mythe kabbalistique du Golem dans le ghetto de Prague popularisé par le roman de Gustav Meyrink, ou celui de Faust .
[3] MOLINARIO Joël, « Crise anthropologique et fin du consensus humaniste : un état  des lieux »,  Revue Transversalités, Revue de l’Institut d’Études Catholique de Paris, Supplément 3, 2015, p.17
[4] KURZWEIL Ray, GROSMAN Thierry, Serons-nous immortels ?  Dunod, 2006
[5] La Croix « le Transhumanisme s’épanouit dans la Silicon Valley », édition du 3/11/ 2015, page 15.
[6] ALEXANDRE Laurent, « Les neuro révolutionnaires » conférence à l’USI (Unexpected Source of Inspiration) le 20 juin 2014, https://www.youtube.com/watch
[7] BESNIER Jean Michel, Demain les posthumains, le futur a t il encore besoin de nous ? Fayard, Paris 2010, 216 p.
[8] VERGELY Bertrand, la tentation de l’homme -Dieu, ed. Le Passeur, Paris, 2015,138p.
[9] LUDD Camille « la révolte des chimpanzés du futur »  Site web Vimeo.com et www.piecesetmaindoeuvre.com
[10] www. extropy.org.
[11] http://Humanityplus.org.
[12] http://transhumanistes.com.
[13] More Max « Essential Transhumanism » copyright la spirale.org.
[14] Projet qui rassemble autour de l’école polytechnique de Genève 90 centres de recherche de 22 pays en Europe qui vise à simuler un cerveau humain (Human Brain Project), projet directement concurrent du projet américain « Human Cognome » de Standford University
[15] Journal le Monde, 17 mars 2016.
[16] http://premium.lefigaro.fr/actualite-france/2016/03/18/
[17] ibid
[18]VEY Tristan, « des manipulations génétiques sur des embryons humains autorisées en Grande Bretagne » Le Figaro.fr, Sante, 1 février 2016
[19] MATTEI Jean François, « Ouvrir la PMA serait contraire à nos principes fondamentaux », La Croix du 21 mars.
[20] www.liberation.fr/.../crisprcas9-une-methode-de-modification-genetique-...
[21] SERGENT Denis «  Le Crispr-Cas 9, outil génétique révolutionnaire et dangereux », La Croix ,9 février 2016,
[22] CHARPENTIER Emmanuelle « des qu’on manipule le vivant il y un risque de dérive », Le Figaro, 22 mars 2016,
[23] La société Growing Plant en Californie avec l’aide de la Singularity University de R. Kurzweil incorpore  déjà des gènes de lucioles dans  des plantes pour les rendre phosphorescentes
[24] Le Journal du Dimanche, «  Le couper coller de l’ADN », 20 décembre 2015.
[25] ibid
[26] ibid
[27] http://www.jolpress.com/article, « oscar-pistorius-un-coureur-sans-vague-lame » 258578.html
[28] MOLINARIO Joël, « Le post humanisme entre humanité élargie et fin de l’humanisme », Transversalités, supp. 1, Revue de l’institut d’études catholiques de Paris, Desclee de Bouwer, 2014, p.49
[29] ibid., p.155
[30] http://www.huffingtonpost.fr/2016/03/12/. « Jeu-de-go-ordinateur-champion-du-monde-battu »
[31] http://www.huffingtonpost.fr/2016/03/12/.  Google-jeu-de-go-ia-intelligence-humaine-générale.
[32] GAUDIN Thierry, Pouvoirs du rêve, centre de recherche sur la culture technique, Les éditions d’organisation, Paris 1984, p.117 et  2100 récits du prochain siècle, Payot, 1990
[33]ROSNAY Joël (de), « l’intelligence artificielle : le Transhumanisme est narcissique. Visons l’hyperhumanisme », Journal l’Obs.26.04 2015
[34] GAUCHET Marcel, le désenchantement du monde, Folio essais, Gallimard, 1985, 433p.
[35] GAGEY Henri -Jérôme, « Une crise sans précèdent », revue Transversalités, Supplément 1, op.cit. p.21.
[36] ibid., p.21.
[37] La croix, Jean Marie Besnier, entretien avec Marine Lamoureux, 3/11 /2015.
[38]MUNNICH OLIVIER REY Arnold, « l’homme deviendra t- il immortel ? », Le Figaro, 21 janvier 2015.
[39] AGACINSKY Sylvia, « fabriquer l’humain ? », Revue Transversalités, suppl.3, op.cit. p.51à 66
[40] FERRY Luc, la plus belle histoire de la philosophie, Robert Laffont, Paris, 2014, page 189
[41] SARTRE Jean Paul, l’existentialisme est un humanisme, Gallimard, Folio Essais, Paris, 1996, page29
[42] ARAGON  Louis, la Diane française, la rose et le réséda, Edition Seghers,
[43] GAGEY Henri -Jérôme, « Une crise sans précèdent », Revue Transversalités, Suppl. 1, op.cit.  p.23 et 25
[44] MEDEVIELLE Geneviève, « Pluralisme éthique et laïcité en théologie morale », Revue de l'Institut catholique de Paris, 2004, p.71-93.
[45] LAUDATO SI Lettre encyclique, Paris, Artege, 2015.
[46] MARROU Elise, «  l’animal blessé, Kafka, Coetzee, Diamond », Transversalités. Suppl. 2, op.cit. P.163.
[47] DEBRAY Régis, Eloge des frontières, Gallimard, Paris, 2010, p.50.
[48] VALERY Paul, l’idée fixe : dialogues, Bibliothèque de la Pléiade, Tome II, Gallimard, Paris, p.215
[49] Ibid. p. 46
[50] MONOD Jacques, le hasard et la nécessité, essai sur la philosophie naturelle de la biologie humaine, Editions du Seuil, Paris, 1970
[51] MEDEVIELLE Geneviève, penser l’humanisation après l’humanisme, Transversalités, suppl.3, op.cit .p.218
[52] THEVENOT Xavier, Morale fondamentale, op.cit.p126.

[54] MEDEVIELLE Geneviève, « penser l’humanisation après l’humanisme », Transversalités, Suppl.3 ; op.cit., p.214
[55] ONFRAY Michel, le ventre des philosophes, critique de la raison diététique, Grasset, Paris, 1990
[56] Science et Vie, Avril 2016, « Les pouvoirs du ventre »,
[57] Le Monde, 23/03 /2012 « La flore intestinale joue avec notre cerveau ».
[58] ROUX Marc  « faudra t-il simuler les relations cerveau/intestins ?transhumanistes.com/archives/1015 
[59] Le Figaro,  21 janvier 2016 « l’homme deviendra t il immortel ? », entretien avec A. Munnich-Olivier Rey.
[60] BADIALI Federico, «  se mettre a l’écoute de la crise, l’expérience du trouble dans l’anthropologie théologique italienne », Transversalités, supplément 1, op.cit. p.101
[61] Le Figaro ,28 mars 2016, Interview de Claude Hadjaj.
[62] Catéchisme de l’église catholique, §365, p.84
[63] THEVENOT Xavier, op cité,  p.39
[64] Ibid. Ch. 2 p.39
[65] Le philosophe MELEAU PONTY  cité par Henri LAUX  dans un cours introductif à l’ IST/Sophia Antipolis 2016 
[66] GAGEY Henri Georges  « Nous vivons un époque formidable ».Transversalités .Supplément 3 .IEP Paris.2015. p.32.
[67] Journal du dimanche, 20/12 2015 « le coupe coller de l’ADN »
[68] ROSNAY Joël (de) «  Intelligence artificielle : le Transhumanisme est narcissique .Visons l’hyperhumanisme » Journal l’Obs. J 26/04 /2015
[69] RILKE Rainer Maria, Le livre de la Pauvret et la mort, Trad. Jacques Legrand, Aryen, Paris 1997 p.19 et 20
[70] PELLETIER Anne Marie « As tu un fois dans ta vie commande au matin ? » Transversalités. Supplément 3, Revue de l’ICP, Paris, 2015, p.95.
[71] Ibid. p.70
[72] THEVENOT, Xavier repère éthiques, P 36.
[73] La Croix du 2/11 /2015. Cité par Loup Besmond de Senneville « comment le Transhumanisme percute la foi chrétienne ». 
[74] Ibid
[75] TREBUCHET Marie Dominique, « cours de théologie morale », IST /Sophia-Antipolis,
[76] MOINGT Joseph, « le métier de théologien » Revue Esprit .entretien avec Joseph Moingt, Bayard-Presse, avril 2016
[77] THEVENOT Xavier « Morale fondamentale » op.cit.p109
[78] Jean Michel Besnier, Demain les post humains, op.cit.p.13
[79] Geneviève Médevielle, op .cite Transversalités suppl. 3 p.218



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